Quand la thérapie devient un doudou (ou une drogue douce qui t’endort)
Il y a ce moment étrange.
Celui où tu devrais te sentir mieux… mais tu y retournes quand même.
Tu dis que c’est pour aller « plus loin ». Pour « consolider ». Pour « explorer en profondeur ».
Mais au fond, tu le sais. T’as pas besoin de plus de lucidité. T’as besoin de bouger.
Et tu n’y arrives plus.
Tu ne fais plus de thérapie. Tu fais du surplace.
🧸 « Je me sens bien après mes séances »… mais est-ce que tu avances ?
C’est doux, une séance.
Tu parles. Tu pleures. Tu respires. Tu te sens entendu·e.
Tu touches des vérités. Tu mets des mots. Tu comprimes les silences.
Et puis… rien.
Pas de décision. Pas de passage à l’acte. Pas de mouvement.
Juste un apaisement temporaire. Comme une sieste mentale.
La thérapie devient un doudou. Une bulle qui protège.
Mais aussi une anesthésie douce.
Tu as mal ? Tu réserves une séance.
Tu doutes ? Tu réserves une séance.
Tu es perdu·e ? Tu réserves une séance.
Et tu ne fais plus l’effort de traverser par toi-même.
Comme si tu ne pouvais plus t’autoriser à aller mieux sans validation.
Tu t’attaches au cadre… mais pas à ta transformation.
🧪 Ce n’est pas une relation d’aide, c’est devenu une relation de dépendance
Tu connais la salle. La voix. Le rituel.
Tu sais comment ça commence. Tu sais quand ça se termine.
C’est confortable. Prévisible. Apaisant.
Mais aussi… stérile.
Parce que quand tout devient prévisible, il n’y a plus de risque.
Et sans risque, pas de transformation.
La psychologue Susan Anderson, spécialiste de la dépendance affective, parle de « transfert de sécurité » : on remplace une carence originelle par un cadre thérapeutique rigide. On projette sur l’autre notre besoin d’être sauvé.
Et ça marche. Un temps.
Jusqu’au jour où tu n’oses plus choisir sans passer par lui. Par elle.
Tu n’agis plus pour toi. Tu attends l’accord. L’analyse. L’interprétation.
Et tu tournes en boucle.
La lucidité ne suffit pas. À un moment, il faut se lever.
🥾 Comprendre sans agir, c’est juste une autre forme de paralysie.
Tu peux tout analyser.
Tu peux comprendre ton passé, tes schémas, tes blessures.
Tu peux même pleurer chaque semaine. C’est précieux. C’est utile.
Mais si tu restes là, tu n’évolues pas. Tu confirmes.
Comme le dit si bien le psychologue Carl Rogers :
« La seule personne qui est éduquée est celle qui a appris à apprendre… et à changer. »
Apprendre sans changer, c’est de la consommation.
Changer, c’est un acte.
C’est poser un choix. Dire non. Dire stop. Dire « maintenant ».
Tu n’as pas besoin d’un thérapeute à vie.
🧭 Tu as besoin de toi.
La meilleure des thérapies, c’est celle qui se termine un jour.
Parce qu’elle a produit un basculement.
Parce qu’elle t’a ramené·e à toi. À ta souveraineté.
Une bonne thérapie ne t’attache pas à l’analyste.
Elle te reconnecte à ton pouvoir. À ton feu.
Elle te rend libre.
Si tu es encore en thérapie après 6, 8, 10 ans… sans décision, sans changement, sans alignement nouveau : pose-toi la vraie question.
Tu veux quoi ?
- Être accompagné·e dans la compréhension… ou dans la reconstruction ?
- Être vu·e… ou être acteur·rice de ta propre vie ?
- Raconter… ou incarner ?
Il y a un moment où continuer, c’est fuir.
🕳️ Parce que tant que tu es en analyse… tu n’as pas à agir.
Tu continues à parler de ton enfance…
De ta mère…
De ton père…
De ton ex…
Et tu ne regardes pas ta vie d’aujourd’hui.
Tu ne regardes pas ton couple qui s’effrite.
Ton travail qui t’assèche.
Tes choix qui te contredisent.
La thérapie devient un sas.
Un lieu où tu vis par procuration.
Un théâtre de ta lucidité.
Mais la scène principale, elle est dehors.
Dans ta vraie vie.
Et pendant que tu joues les explorateurs de l’âme, tu oublies de vivre.
Alors, qu’est-ce que tu veux vraiment ?
🔥 Est-ce que tu veux aller mieux, ou juste comprendre pourquoi tu vas mal ?
C’est une vraie question. Frontale. Mais essentielle.
Beaucoup veulent comprendre.
Mais peu sont prêts à affronter le vide du changement.
Comprendre, c’est intellectuel.
Changer, c’est existentiel.
Changer, c’est prendre le risque d’être jugé, de rater, de se sentir seul.
Mais c’est aussi retrouver de l’élan, du feu, du vivant.
Ce que tu peux faire, concrètement
- Pose-toi cette question en fin de séance : Qu’est-ce que je vais faire de ça ?
- Mets en pause. Une séance sur deux. Puis une tous les mois. Puis stop.
- Rends-toi autonome. Écris. Crie. Bouge. Teste. Echoue. Recommence.
- Cherche du soutien vivant. Pas un fauteuil. Un miroir humain.
Et si c’était maintenant ?
Si tu sens que ça tourne en rond, ce n’est pas un échec.
C’est peut-être juste que la thérapie a fait son job.
Et que maintenant, c’est à toi de jouer.
Pas en sautant sans filet.
Mais en te tenant droit. En marchant à ton rythme.
En faisant un pas dehors. Vers toi.
Parce qu’il y a un moment où comprendre ne suffit plus.
Il faut vivre.